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J

J’ai tout perdu

 

Samedi  2 mai 1903

Joseph, dans sa chambre n’arrive pas à s’endormir…la tête entre ses mains, il pleure. Ses parents se sont serrés pour lui faire une place dans cette petite maison de Gretz-Armainvilliers qu’ils habitent depuis que le père est à la retraite.

Son couple a volé en éclats et Angèle, sa femme, lui a dit de partir, de quitter leur foyer du Perreux*sur-Marne où il habitait encore avec elle il y a peu, avec elle et leur fils Robert… ce fils qu’il chéri tendrement. Tout est  de sa faute, il le sait.

Assis sur le lit, la tête entre les mains, il sanglote.

 

« C’est ma faute. Tout est de ma faute. Je le sais bien.  

Oh Angèle, quand  tu m’as dit que ce n’était pas  possible, plus possible,  je n’y ai pas cru tout de suite… Je ne pouvais pas. Je ne voulais pas. Tu me l’avais dit si souvent et chaque fois  j’ai promis et chaque fois tu m’as  redonné une chance. Et chaque fois j’ai replongé.. C’est sur ça pouvait pas continuer ainsi tout le temps..

Cette  fois ci c’était autrement. Je le savais bien, tout au fond de moi.

 Dans tes yeux il y avait toujours la même tristesse, oui, pour ça, oui. Mais il y avait aussi de la colère, et de la froideur ….

Tu as rajouté que je détruisais votre vie, à toi… et à Robert et je l’ai su, oui je l’ai su que que c’était fini, vraiment fini. Tu avais pris ta décision et tu n’allais pas revenir en arrière

Un gouffre s’est ouvert sous moi.

Je voulais dire que je regrettais, mais je savais que c’était inutile, je l’avais dit tant de fois.

Si tu savais, ma belle Angèle, combien je regrette maintenant. »

 

Joseph s’est levé et marche de long en large dans la petite chambre

«La boisson, mon Dieu,  qu’elle maladie… je ne pourrai jamais m’en sortir… ça fait trop longtemps que je bois et de plus en plus. »

.

 

 

Jean Brienne, son père était perruquier à Pesmes.

 

Mais le métier ne le faisait plus vivre, et en 1874 il devint facteur. En 1882 il demanda à être muté en région parisienne, vendit sa petite maison  et parti avec femme et enfants. Jean avait 10 ans.

Jean ne s’est toujours pas rassît.

« Pourquoi a-t-il fallu qu’on parte de Pesmes. Mes copains et le village m’ont toujours manqué. Je suis certain que là-bas j’aurai mené une vie paisible. Je serai devenu perruquier comme père….J’ai toujours voulu lui ressembler, finalement. Je voulais qu’il soit fier de moi.

 Je l’admirais, il avait été musicien dans l’armée, avait fait la campagne de Crimée puis celle d’Italie.

C’est pour faire comme père que je me suis engagé  pour 5 ans… engagé comme soldat musicien, comme lui »

 

Un court moment, le visage s’apaise et Jean  s’arrête de tourner comme un ours en cage.

« …. La musique, j’aimais bien… et j’avais l’impression de suivre tes traces…papa.  Alors quand je suis revenu, j’ai continué la musique. En semaine, j’étais le jour un employé modèle des chemins de fer. Les Samedis soir, j’allais jouer dans les bals publics. Après le bal, je faisais la fête, un peu….

Je me demande si ça n’a pas commencé là…. mon envie d’alcool…mais non, c’était que les samedis, et que le soir des samedis.

J’étais joyeux … et je l’ai rencontrée, ma belle Angèle. »

 

 

 

Son père à elle, Achille Faulle,  avait été tailleur de pierre dans l’Yonne, à Andryes.

 

 Il n’a pas vendu sa maison, mais lui aussi est un jour parti pour la région parisienne, il voulait faire fortune dans le commerce du vin

Quand Joseph rencontre Angèle, les deux familles habitent toutes les deux  dans l’immeuble du 48 avenue Ledru Rollin au Perreux sur Marne.

Jean pleure à nouveau

« Si seulement je pouvais retourner en arrière.

Tiens par exemple le jour où  je l’ai vue pour la première fois,  ma belle Angèle. Je descendais les escaliers, pour aller jouer dans  un bal du samedi soir, et elle revenait chez elle. Elle m’a souri et je suis tombé amoureux. J’ai rapidement été invité chez elle. On y mangeait bien, dans de la belle vaisselle et les vins étaient fabuleux.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

On s’est marié, très vite, trop vite peut être  …..elle avait 18 ans et moi 28. J’étais si heureux. Robert, notre fils, est né 9 mois après. Mais j’avais déjà, ce jour là,  ce pincement au cœur, ce mariage était bien au-dessus de nos moyens..

Rien n’était équilibré… ma famille pas trop riche et un peu austère… sa famille qui avait de l’argent et toujours dans la fête. Et le contrat de mariage… elle avait en dot une maison, des meubles, de l’argent… et moi ? mes partitions et mes instruments de musique.. !!!

Je n’étais pas digne d’eux, pas digne d’elle… je me  suis toujours senti inférieur, oui inférieur. On avait même une domestique, insensé pour ma famille.

Petit à petit je me suis mis à boire de plus en plus, aux repas  de famille, puis tous les jours… Je me servais dans le stock de notre petite épicerie…

Et de plus en plus souvent ces disputes avec Angèle. Et ces pleurs de Robert  qui ne comprenait pas pourquoi on se disputait.

Je buvais, on se disputait, je promettais de cesser. Et je recommençais. »

 

Le jour se lève sur la petite ville de Gretz. Joseph est allé à la fenêtre. Il  aurait bien besoin d’un petit verre, mais il n’y en a pas chez ses parents et de toute manière, il sait que tout est fini. Il ne pleure même plus.

 

 

 

 

 

 

« Hier il a eu 5 ans, mon Robert et je n’ai même pas eu le droit de le voir.

Angèle ne veut pas que le vois, tant que je boirai. Elle ne veut plus qu’il me voit ivre, elle ne veut plus qu’il subisse nos disputes… ET je ne vivrai jamais plus avec eux, elle me l’a dit aussi. C’est fini.

Le jour se lève, à quoi bon…. je n’ai pas de travail, plus de famille, ici je ne suis plus chez moi…

Je n’ai aucun projet, rien à faire. Je ne suis rien d’autre qu’un poids mort pour mes parents…..père et mère s’occupent du fils de Virginie (la sœur de Joseph) et papa a dû recommencer à travailler… alors moi en plus….impossible

Je n’ai plus rien. J’ai tout perdu, tout perdu. La vie n’a plus aucun sens pour moi.

 

Le 3 mai à 6 heures du matin, Joseph se donna la mort chez ses parents.

Jean,  acheta une concession trentenaire au Perreux, où il enterra son fils.

Françoise,  ne surmonta pas le suicide de son fils, fut internée et même  pas un après, elle rejoignit Joseph dans la tombe.

Jean,  continua à assumer vaille que vaille,  déménagea avec Paul pour Le Perreux … et quand il fut vieux, c’est Paul qui s’occupa de lui… Mais Paul se mit à boire aussi… son mariage ne fut guère heureux, l’argent dilapidé et Jean enterré dans la fosse commune.

Les deux sœurs de Joseph eurent  une vie pleine de trous et de mystères.

La  concession de Gretz, mon grand-père Robert n’en eu jamais connaissance.

Angèle  quitta le Perreux et coupa les ponts avec les Brienne. Elle ne fit rien pour que Robert garde une mémoire intacte de son père. Bien au contraire.

Un jour il dit à sa belle-fille, Irmgard, ma mère,

« J’ai honte. Mon père buvait et s’est suicidé »

 

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