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Hier un ami m’écrivait que mon arrière-arrière-grand-père, Jean Baptiste Brienne  avait « eu une vie bien mouvementée par rapport à la gent féminine ».

Et je me suis rendue compte, et j’en suis maintenant désolée,  que je n’avais guère parlé des femmes de ma famille. Et que cela avait pu laisser planer l’impression que leurs vies avaient été plus linéaires, plus calmes, moins tourmentées pour reprendre ses mots.

E pourtant toutes, chacune à sa manière  bien sur différente des autres, toutes étaient en quelque sorte des » wonder-women », en tous des cas « wunderbare Frauen » (femmes admirables).

Je dois réparer très vite cette injustice, car nous arrivons à la fin de l’alphabet ; je le leur dois ! Et ça tombe bien, nous en sommes au W. Donc…je commencerai donc par les « wunderbare Frauen, » les femmes formidables de ma famille allemande.

W

wonder women

wunderbare Frauen

Dans ma famille allemande

 

Irmgard EILENBROCK. 1924/2016 ma mère

J’ai déjà parlé d’elle à la lettre I « I comme Irmgard ».

Je la trouve admirable parce qu’elle est ma mère, mais aussi parce qu’elle a subi cette période horrible de la guerre et du nazisme. Elle avait 9 ans lors du début du 3ème Reich, 12 ans au début de la guerre et 19 ans quand les alliés ont bombardé Essen et ses environs.

 

Autrement dit,  son enfance et sa vie de jeune fille se sont trouvés spoliés de l’insouciance et des plaisirs et sorties qui auraient dû en faire partie.

Elle m’a raconté la peur de la dénonciation, la douleur de voir des gens ne plus revenir, la colère devant  l’horreur des nazis. Elle m’a raconté sa terreur quand les bombardements l’obligeaient à se réfugier dans un abri. Ces bombardements qui avaient commencé  en 1941 et duré jusqu’en 1945.

 Et malgré tout, son envie d’apprendre et de se former la fit braver les bombardements,  elle  s’est inscrite dans une école de langues et de commerce à Bochum qui était une cible privilégiée des alliés. Le 1er novembre 1944 vit la quasi destruction de cette ville, mettant ainsi fin aux cours de maman, elle avait 20 ans ;

Je la trouve admirable aussi  en ce sens qu’elle fut toute sa vie fidèle à mon père malgré et envers tout. Elle est morte dimanche 28 août 2016. Le dimanche d’avant elle parlait encore de lui avec de l’amour plein les yeux 

Sa famille maternelle

Anna GÖRTZ. 1886/1958. La mère de maman.

J’avais 10 ans quand Oma Anna est morte et je me souviens très bien d’elle.

Une femme toujours joyeuse et aimante.

Elle était ma marraine.

Maman et son frère jumeau la portaient aux nues et je dois dire que son beau-fils, mon père, l’admirait lui aussi beaucoup.

 

Elle était une femme indépendante qui avait un poste de vendeuse en chef  à l’épicerie Wohlfahrt quand elle a connu Opa, mon grand-père,  un veuf, père de 5 enfants qui avait sa cordonnerie juste  à côté. Beaucoup de femmes s’en seraient effrayées. Elle non. Elle l’épousa.

Il avait beaucoup de dettes, puisqu’il venait de construire cette maison dans laquelle se trouvait son magasin. Mais ça aussi ne l’effraya pas. Elle prit la comptabilité en main, s’occupa du magasin de chaussures et cultiva le grand terrain sur l’arrière pour nourrir sa nouvelle grande famille.

Sa vie de jeune mariée déjà bien difficile se compliqua encore, quand, un an à peine après, éclata la première guerre mondiale avec ses privations, le fils aîné de son mari qui se fit tuer dès les premiers jours et les autres enfants qu’il fallait élever, sans oublier le magasin à tenir et le jardin à cultiver pour nourrir tout le monde.

Ne mangeant pas toujours à sa faim,  à la limite de l’épuisement, elle ne fut elle-même enceinte que longtemps après. Cet enfant trop gros, déjà mort avant que de naître,  ne put être sorti qu’en étant découpé. Quelle horreur pour une maman.

Elle retomba enceinte et accoucha cette fois ci de jumeaux, ma mère et son frère.

Certes tous les enfants de son mari étaient élevés,  mais des jumeaux et le magasin à tenir, les commandes de chaussures et de fournitures à gérer …  et le jardin à cultiver… et la maison à entretenir, tout ça c’était encore  beaucoup de travail. 

Maman m’avait un jour raconté que chez eux il n’y avait aucun bibelot, car sa mère n’avait pas de temps à perdre quand elle faisait le ménage. Et que chez eux sa mère portait constamment un tablier pour garder propres ses habits, tablier qu’elle enlevait vite quand des clients venaient dans le magasin de chaussures.

Elle est déjà bien fatiguée quand c’est la deuxième guerre mondiale. Pour avoir à manger, elle élève en plus des poules.

Ils ont faim. Sa fille est maigre comme un clou et prend des risques pour apprendre l’anglais et le Français à Bochum.

Son fils est à la guerre en Italie et finit par être fait prisonnier.

Malgré les grands risques que ça comporte, elle accueille chez elle mon père qui n’est pas encore son beau-fils  et qui n’a plus de toit sur la tête.

Malgré  les risques elle s’arrange pour donner du pain aux prisonniers russes qui, sous la surveillance des gardiens,  marchent dans la rue pour rentrer aux camps.

Malgré les risques, bravant l’interdiction,  le jour de la fête Dieu elle pavoise en mettant des tuteurs à haricots aux fenêtres.

Elle accueille dans sa grande maison,  une de ses belles filles avec son mari et d’autres membres de la famille.

Et conserve sa bonne humeur, sa gentillesse et son sourire.

Son cœur est très fatigué, elle sera de plus en plus essoufflée, mais  continuera à s’occuper des uns et des autres et ce malgré l’insuffisance cardiaque grandissante. Allant voir maman au fur et à mesure de ses accouchements, entretenant son jardin, s’occupant de la grande maison.

Jusqu’à ce que son cœur, usé complètement, la lâche un mardi 4 mars 1958 ; elle avait 71 ans

Catharina OYMANNS. 1855/1917.

La mère de Oma, la grand-mère de maman qui ne l’a pas connue.

Je ne sais pas grand-chose d’elle

Mais c’est aussi une « wunderbare Frau » qui a mis au monde 9 enfants en 18 ans de 1881 à 1899.

Une fille mourra en bas âge, 7 se marieront et 5 auront des enfants. D’un seul je ne sais pas ce qu’il est devenu.

Son mari était ouvrier chez Krupp et ils habitaient dans une « Kolonie » lotissement pour les ouvriers de l’usine.  Quand elle est morte elle avait 61 ans et son plus jeune en avait 18. Elle est morte d’une maladie pulmonaire

 

 

Je ne sais rien de précis sur les deux arrière-grand-mères maternelles de maman, Johanna Poth et Allegunda Leyers

Sa famille paternelle

 

Christine GEILE 1838/1881 la grand-mère paternelle de maman, la mère d’Opa

 

Christine est née dans une famille de menuisiers habitant Byfang depuis plusieurs générations. Elle a deux sœurs et a connu une enfance heureuse.

Elle se marie à 21 ans avec un voisin venu de Lichtenau pour travailler à la mine.

Et là, tout se complique pour elle.

Entre 1860 et 1875 elle mettra 7 enfants au monde, dont l’ainée mourra à 3 ans.

La famille est pauvre...

Ils vivent dans un Kotten, ces maisons de mineurs et s’occupe des enfants, des bêtes et des récoltes qui servent nourrir tout ce petit monde.

Elle est mariée depuis 17 ans quand, le 3 mai 1876, un mercredi,  son mari ne revient pas. Il a perdu la vie dans un accident de mine.

Le plus jeune a 1 an, mon grand-père en a 4.

La famille s’installe dans la grande pauvreté.

Ils n’ont pas de chaussures.

Ils ont faim, mon grand-père ramasse les miettes de pain par terre.

Christine se prive de manger pour ses enfants et travaille sans relâche à cultiver, récolter, nourrir les bêtes.

Cinq ans après son mari, elle mourra d’épuisement et de malnutrition,  laissant ses enfants qui étaient tout pour elle et pour qui elle était tout.

Elle n’a alors que 43 ans.

Je ne sais rien d’Elisabeth Bramsiepe, la mère de Christine, et l’arrière-grand-mère paternelle de maman,

Theresia Lemaire 1801/1840 l’autre arrière-grand-mère paternelle de maman

Elle est née et morte à Lichtenau.

Elle était très pauvre, mariée à un berger. Elle a eu 5 enfants en 8 ans et sa fille ainée est morte en bas âge.

Elle s’occupait des terrains et des bêtes.

À 38 ans elle est tombée du grenier à foins et en est morte. Elle n’avait que 38 ans , son aînée n’en avait que 10 et le petit dernier 4.

 

Il est plus difficile de connaître la vie des femmes de notre famille.

Actes de naissance, de mariage et de décès, et les actes de naissance de leurs enfants,  on ne trouve pas grand-chose de plus.

Mais c’est parfois déjà suffisant pour se rendre compte que leur vie n’était pas facile et qu’elle était même souvent difficile.

Elles assumaient la vie de leur famille, souvent au détriment de leur santé, tout en n’ayant aucun droit, ou presque aucun.

Je tenais ici à leur rendre hommage car vraiment elles étaient admirables, des « wunderbare Frauen », de véritables wonder-women.

Tag(s) : #généalogie
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