Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Une des chansons préférées de mon grand-père Robert Brienne

E

« Elle s’était fait couper les cheveux »

 

Orly…. 1980…. pépé va et vient dans leur petit logement. Tout en mettant la table il chantonne « Elle s’était fait couper les cheveux…….comme une petite fiiiille…. gentiiiile….. ». Mémé le regarde faire. Je souris. Et le voilà qui sourit aussi, de son sourire  légèrement et gentiment  moqueur, qui me manque tant.

Il se tourne vers moi…

« Ah, ma petite fille… ça te fait sourire, hein. Mais ta grand-mère quand je l’ai connue, je suis tombé tout de suite amoureux d’elle. J’étais lithographe chez Puaud, la  petite fabrique d’étiquettes de la rue Chapon à Paris.  C’est là que je l’ai rencontrée,  et qu’elle m’a tapé dans l’œil. C’était en 1922.

Qu’est-ce qu’elle était jolie avec ses cheveux coupés courts…D’ailleurs ses robes aussi étaient courtes c’était la mode…. les femmes à Paris étaient si belles avec cette  nouvelle mode des années folles… Tu sais bien, ces années après  ce qu’on croyait être la «DER" des « DERS».

Les années 20 à Paris, c’était vraiment la folie… l’époque de Joséphine Baker, de Coco Chanel. Le début du jazz, du cinéma

Le cinéma, ta grand-mère en était folle dingue… elle a vu tous les films ou presque…. elle emmenait ton père, tout petit….

Il ne fallait pas lui en compter à ta grand-mère…. son père était mort à la guerre, elle et ses deux sœurs avaient dû se débrouiller et travailler….Mais le samedi soir, toutes les trois, elles allaient danser……

Elle ne fut pas la dernière à suivre la mode… elle s’est fait couper les cheveux très vite… (Sa mère, femme indépendante, ne s’y était pas opposée) 

…et la mode, alors là, pas question pour elle de ne pas la suivre…les robes et jupes juste en dessous des genoux, le petit air mutin qui attirait les hommes… je  ne pensais qu’à elle….. les autres je ne les voyais même plus…

A tel point que je partais à pied de Clichy pour aller la voir à Verrières le Buisson …

Je ne pouvais résister, je ne pouvais lui résister… moi qui avait été élevé plus sévèrement….. tu sais les Bois de Verrières  sont très complices… quand on s’est marié elle était enceinte jusqu’aux yeux…. elle avait 18 ans !

Ce n’est pas pour cela qu’elle s’est assagie… bien au contraire…à Andryes, ou les femmes portaient encore des robes noires et longues, ça ne lui faisait rien du tout de porter des robes sexy et de montrer  ses jambes habillées de bas…. Ma mère était choquée… Moi pas, car ce que j’appréciais par-dessus tout c’était qu’elle soit  ainsi… elle faisait partie des femmes émancipées sans avoir à se battre pour. Elle n’avait pas la langue dans sa poche et les conventions, elle n’avait qu’en faire.

Si tu l’avais vue, Annemarie, danser le charleston avec sa robe courte… si tu l’avais vue.. »

Et pépé continua à mettre la table, son sourire toujours sur les lèvres

Je me souviens de mémé Madeleine et de son franc parler. Je me souviens de certaines choses qu’elle m’a dites et que je ne pourrai répéter dans un challenge aussi sérieux..

Sa modernité a fait de mon père un homme moderne pour qui l’indépendance des femmes n’était pas une option et qui m’a poussée à faire des études… pour que je puisse « dire merde » si j’en avais l’envie ou la nécessité.

Ma grand-mère lisait peut être confidences et intimité et les romans à l’eau de rose, mais il ne fallait pas s’y tromper… Pépé prisonnier en Allemagne, elle a su subvenir à ses besoins et à ceux de leur fils..

 Ce que je suis, je le lui dois en partie…

 

mémé Madeleine (Auburtin, la fille de Georges tué d'un éclat d'obus dans le coeur, Georges mari de Berthe)

pépé Robert (Brienne) (dont le père, Jules Joseph se donna la mort)

Robert est mort en 1984, Madeleine se réfugia dans ses souvenirs et oublia de vivre… elle est morte en 1991

 

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :